Le contrôle douanier des droits de propriété intellectuelle

Le nouveau règlement communautaire des Douanes en matière de Propriété intellectuelle, du 12 juin 2013, a été publié le 29 juin dernier.

Ce règlement abroge le précédent Règlement communautaire n°1383/2003 à compter du 1er janvier 2014.

Les autorités communautaires partent du principe qu’empêcher une marchandise contrefactrice d’entrer sur le marché commun est un moyen efficace d’offrir rapidement une protection juridique réelle au titulaire d’un droit de propriété intellectuelle (considérant 4 du règlement). Elles décident donc d’étendre l’intervention des douanes à certaines infractions qui n’étaient pas couvertes par le précédent règlement communautaire (considérant 5).

Le nouveau règlement contient uniquement des règles de procédure. Il ne fixe aucun critère permettant d’établir l’existence d’une atteinte à un droit de propriété intellectuelle (considérant 10). Sur ce point, le nouveau règlement ne diffère pas du premier.

Le nouveau règlement communautaire peut être résumé en 5 points principaux.

1) Elargissement du champ d’application des actions douanières : auxnoms commerciaux (lorsqu’ils sont protégés en tant que droits de propriété exclusif en vertu du droit national), aux topographies de produits semi-conducteurs (circuits imprimés), aux modèles d’utilité et aux dispositifs qui sont principalement conçus, produits ou adaptés dans le but de permettre de faciliter le contournement de mesures techniques;

2) Clarification des définitions aux objets des droits (art. 2), notamment en ce qui concerne les objets protégés: marques, dessins et modèles, indications géographiques, brevets et certificats complémentaires de protection, obtentions végétales… mais également les marchandises portant atteinte aux droits de propriété intellectuelle : marchandises de contrefaçon, marchandises pirates , marchandises soupçonnées de porter atteinte à un droit de propriété intellectuelle, demande adressée au service douanier, demande douanières nationales, demandes au niveau de l’Union, détenteur des marchandises, déclarant, destruction, mainlevée d’une marchandise…

Nous noterons toutefois que le nouveau règlement ne s’applique pas :

– aux marchandises mises en libre pratique dans le cadre du régime de la destination particulière (article 1.3) ;

– ni aux marchandises sans caractère commercial contenues dans les bagages personnels des voyageurs (article 1.4).

3) Précisions en termes de délais, notamment sur les délais d’intervention des autorités douanières (art. 11 et 12) et de mainlevée (art. 17 et 18). Les délais d’intervention sont placés dans la dépendance de la durée de validité des droits de propriété industrielle (art. 11, 12 et 15).

4) Ouverture des droits d’action auprès des douanes aux « entités cherchant à faire respecter des droits » (considérant 14) et notamment :

aux organismes de gestion collective des droits de propriété intellectuelle (en pratique les sociétés d’auteur, telles que la SACEM, la SCAM, la SPEDIDAM…)

– aux organismes de défense professionnels (au sens de la directive 2004/48/CE du 29 avril 2004)

– et aux groupements de producteurs (au sens du règlement n°1234/2007 et du règlement n°1151/2012).

La question qui se posera en pratique concernera le caractère autonome de ce droit : les sociétés d’auteur ou les organismes professionnels de défense devront-ils détenir un mandat spécial d’action du titulaire dont les droits ont été violés, ou pourront-ils invoquer un simple mandat général de gestion ? La référence à l’article 4 de la Directive du 29 avril 2004 ferait pencher la réponse, en pratique, vers la seconde solution.

5) Destruction des « petits envois de marchandises pirates » sans l’accord explicite du demandeur dans chaque cas (considérant 17 et article 26). Cette procédure de destruction s’appuie sur une déclaration unique du titulaire du droit de propriété intellectuelle bénéficiaire d’une décision des autorités douanières, faisant droit à une demande.

A première analyse, la solution de l’arrêt Nokia – Philips, qui a écarté du champ d’intervention des autorités douanières des marchandises suspectes de contrefaçon placées sous le régime de transit externe ou en transbordement reste toujours en vigueur (CJUE 1er décembre 2011, aff. C-446/09 et C-495/09, Koninklijke Philips Electronics NV c/ Lucheng Meijing Industrial Company Ltd et a. et Nokia Corporation c/ Her Majesty’s Commissioners of Revenue and Customs) (art. 1er du règlement).

Nous noterons que, pour l’évaluation d’un risque de violation d’un droit de propriété intellectuelle, les autorités douanières sont invitées à tenir compte des probabilités de détournement des circuits de distribution. Cette invitation applique la déclaration sur l’accord sur les ADPIC et la santé publique (Doha, 14 novembre 2001). Elle ne concerne a priori que les médicaments (considérant 11).

Le règlement contient également des dispositions pour assurer la coopération des différents services douaniers de l’Union européenne. Cette coopération concerne notamment les échanges d’informations relatifs à la nature des marchandises suspectes de contrefaçon, à leur origine et leur destination, aux mouvements des moyens de transport utilisés, aux lieux de transbordement, aux références des conteneurs (article 22).

Source: Eur-Lex.

 

(Article mis à jour le 17 juillet 2013)

1 Comment on "Le contrôle douanier des droits de propriété intellectuelle"

  1. Un article bien intéressant ! Merci!

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