Le Ministère de la Culture et de la Communication a donné mission à Pierre Sirinelli de préparer une réforme du droit de l’internet et de la communication, pour favoriser la diffusion des œuvres dans l’univers Web 2.0, dans le respect des droits de propriété intellectuelle.
Spécialiste du droit de l’immatériel, Pierre Sirinelli est notamment professeur à l’université Paris-1 (Panthéon-Sorbonne) et doyen honoraire de la faculté Jean Monnet. Il est également membres de différents centres et associations professionnelles (Centre d’Études et de Recherche en Droit de l’Immatériel, Master Droit Innovation Communication Culture, l’Association pour la protection internationale du droit d’auteur, l’Association Littéraire et Artistique Internationale et Conseil Supérieur de la Propriété Littéraire et Artistique).
Le 4 juillet 2008, Pierre Sirinelli avait remis un rapport sur le régime juridique des prestataires techniques de l’Internet, régi par la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 sur le commerce électronique et la loi n°2004-545 du 24 juin 2004 dite « Confiance dans l’Economie numérique ».
Le rapport, rédigé au sein du Conseil Supérieur de la Propriété Littéraire et Artistique, établit un état des lieux des usages et du cadre juridique de l’Internet.
Aujourd’hui, l’utilisation par les internautes des outils technique du Web 2.0 amène à la diffusion des œuvres protégées par les droits d’auteur ou les droits voisins (on qualifie ainsi les droits des artistes-interprètes, ou des traducteurs, par exemple). Les conflits en contrefaçon se sont multipliés, souvent dans l’incompréhension d’un consommateur-acteur n’ayant pas anticipé toutes les conséquences de ses actes. La contrefaçon est ainsi devenu un phénomène de masse, susceptible de porter préjudice aux artistes.
La diversité des décisions de justice invite à se poser une question: le cadre juridique actuel est-il adapté à une situation devenue très différente, d’un point de vue social ou économique, à celle qui prévalait lors de l’adoption de la directive sur le commerce électronique ?
La multiplication des plates-formes de contenu et de partage en ligne apporte de nouveaux outils de diffusion des connaissances. La mission de Pierre Sirinelli ne consiste pas à tarir cette source d’expansion de la culture, mais au contraire de la favoriser en proposant une amélioration de la législation existante. Parmi les pistes examinées figureront, selon la lettre de mission des Ministères de la Culture et de l’Industrie:
– la rédaction d’une Charte consignant les engagements des acteurs du Web 2.0, « sans préjudice de la conclusion des accords nécessaires à une utilisation licite des contenus en ligne »; cette proposition ne manque pas de surprendre, et sonne comme un aveu d’impuissance du législateur à faire respecter des règles fondées sur le bien commun. En effet, l’existence et la portée d’une « Charte » suppose l’engagement des souscripteurs sur un ensemble de pratiques et de bonnes conduites. Les souscripteurs n’ayant pas ratifié la Charte pourraient-ils s’y soustraire ? A nouveau, cette proposition révèle l’affaiblissement du respect de la loi au profit d’un accord de type contractuel.
– évaluer, choisir et généraliser à moyen terme les technologies efficaces de marquage et de reconnaissance numérique des contenus (fingerprinting ou watermarking). L’intensité des débats intervenus lors de la réforme du droit d’auteur sonne ici comme en écho. Rappelons-nous les risques soulevés pour le consommateur, généré par l’absence d’interopérabilité entre plate-formes et supports d’enregistrement. D’autre part, les risques de fichage et d’atteinte aux libertés publiques ne doivent pas être sous-estimés. Gageons que les propositions futures de la commission appelleront une réforme de la loi « informatique et liberté ».
– la réalisation des catalogues de marquage les plus larges possibles.
– les conditions financières, techniques et juridiques d’une mise en partage centralisée des données et des métadonnées de protection, par exemple sous la forme d’un répertoire national protégé permettant l’enregistrement des contenus protégés et à tout prestataites techniques de tirer les conséquences de cette protection. Cette proposition s’analyse en la création d’un système de copyright similaire à celui en vigueur aux Etats-Unis. Elle pourrait affaiblir les racines du droit d’auteur français, qui protègent les oeuvres de l’esprit du seul fait de leur création, et indépendamment de toute procédure d’enregistrement.
Pierre Sirinelli devra rendre un rapport d’étape le 30 avril 2009, et un rapport définitif et des propositions avant le 30 juin 2009.
Source: Communiqué de presse du Ministère de la Culture et de la Communication.